26.10.08

Mis en examen, des néonazis invoquent la "haine de la racaille"


THOMAS WERLET ET KEMI SEBA
LE MONDE

Six personnes, âgées de 19 à 35 ans, soupçonnées d'appartenir à un groupe néonazi, ont été mises en examen par un juge d'instruction d'Evry, jeudi 23 octobre, pour "participation à un groupe de combat" et "détention et port d'armes" dans le cadre de l'enquête sur des fusillades intervenues le 28 mai à Saint-Michel-sur-Orge (Essonne). Deux hommes cagoulés, en voiture, avaient tiré au moins trente-cinq balles avec un fusil-mitrailleur, ne provoquant "par miracle", selon une source judiciaire, que des dégâts matériels (Le Monde du 3 juin).


L'enquête avait rapidement mis en évidence l'implication de jeunes engagés dans un groupuscule appelé "Nomad 88" (88 correspondant au double H, 8e lettre de l'alphabet, renvoyant au salut nazi "Heil Hitler") et désireux de venger l'un d'entre eux agressé peu de temps avant dans son lycée.

Trois individus avaient été mis en examen début juin, dont deux suspectés d'être le tireur et le conducteur de la voiture, pour "tentative d'assassinat" et "détention et transport d'armes". Au cours des perquisitions, les policiers avaient saisi de la littérature néonazie et un arsenal important, notamment des armes, des munitions et des composants servant à la fabrication d'explosifs.

Les nouvelles interpellations, réalisées mardi 21 octobre, ont visé les autres militants de Nomad 88. Au cours de leurs auditions, ceux-ci n'ont pas reconnu ouvertement leur appartenance à la mouvance néonazie. "Ils ont fait état de leur volonté de nettoyer certains quartiers de la racaille dans la mesure où, à leur avis, ni la police ni la gendarmerie ne le feraient", explique une source judiciaire. En garde à vue, certains ont évoqué le fait de s'armer pour se préparer à l'hypothèse d'une "guerre civile" en France.

ETROITE SURVEILLANCE
Plusieurs cadres d'un autre groupuscule extrémiste, appelé la Droite socialiste, ont également été placés en garde à vue, mais pas mis en examen. Les policiers entendaient mesurer le degré de proximité entre ce parti et "Nomad 88". "J'ai expliqué que nous n'avions pas de lien avec "Nomad 88" (...) et que nous avions seulement utilisé leur service d'ordre parce qu'il était gratuit. Je pensais que c'était simplement des "cogneurs". J'étais à des années lumière d'imaginer qu'ils étaient en possession d'un arsenal militaire", a indiqué au Monde le président du mouvement, Thomas Werlet, au sortir de sa garde à vue.

La Droite socialiste, qui se veut "nationaliste-socialiste", fait l'objet d'une étroite surveillance de la part des services de renseignement depuis plusieurs mois à cause de son activisme dans les milieux de l'ultra-droite. Thomas Werlet et quatre de ses proches avaient été interpellés en 2005 dans une forêt jouant au paintball avec des uniformes soviétiques et allemands. Ils avaient été condamnés à de la prison avec sursis pour exhibition d'insignes rappelant des crimes contre l'humanité.

Plus récemment, la Droite socialiste a organisé des manifestations contre le "sionisme" avec Kémi Séba, l'ancien leader du groupuscule radical noir Tribu Ka, dissous en 2006 pour "antisémitisme".


Luc Bronner